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N’aimer que Dieu seul...La vie monastique, source de vie

Dernière mise à jour : 21 févr. 2023




Qu’y a-t-il de plus important dans la vie d’un homme sinon aimer et être aimé ? ... Toutes les chansons le proclament, sur tous les tons, dans tous les peuples. De quel amour parlons-nous seulement ? L’amour véritable donne d’être pleinement soi-même, heureux de la vie qui est offerte, conscient d’être unique parmi des milliards d’êtres humains. « Car l’amour est fort comme la mort, la passion, implacable comme l’abîme, ses flammes sont des flammes de feu, fournaise divine. Les grandes eaux ne pourront éteindre l’amour, ni les fleuves l’emporter. Un homme donnerait-il toutes les richesses de sa maison pour acheter l’amour, il ne recueillerait que mépris. » dit le plus beau chant à l’amour dans la littérature biblique, le Cantique des cantiques.

L’homme, épris du véritable amour, est, sur toutes sortes de chemin, en quête de ce graal précieux qui lui ouvrira les portes du bonheur d’aimer et d’être aimé. Parmi les multiples passions et désirs humains les chemins de l’égarement sont nombreux, fusse sous de nobles prétextes. Jeté dans les circonstances particulières de son histoire, au sein d’un peuple particulier sur un continent donné, l’homme ne cesse de chercher. Au long de l’histoire de l’humanité des civilisations il se forge des réponses à portée d’homme qui ne manquent pas de grandeurs.

Quête religieuse aux multiples visages qui suscite, au long des siècles, des hommes et des femmes se retirant pour creuser le meilleur de leur civilisation et religion. Israël, petit peuple du Moyen Orient, né d’une histoire de transhumance parmi des semi-nomades errant de Mésopotamie à l’Égypte en passant par Canaan, voit naître en son sein, dans les derniers siècles avant Jésus Christ, une forme de vie retirée. Des juifs partaient vivre au désert. Après trois siècles environ d’existence l’Église chrétienne engendrera dans les déserts d’Égypte la vie érémitique (en solitaire), puis cénobitique (en communauté). Ce qui donna plus tard la vie monastique sous la conduite de grands maîtres comme saint Antoine, saint Basile et saint Benoît.

Des chrétiens font le choix pour toute leur vie de vivre dans un lieu retiré. Ils quittent les responsabilités familiales, sociales et politiques de leur temps pour ne se consacrer qu’à l’essentiel de l’essentiel de toute vie d’homme : servir l’Amour en personne, Jésus Christ venu nous révéler l’Amour du Père, sans lequel tous nos amours humains risquent de se fourvoyer. « Tu nous as fait pour Toi, Seigneur, et notre cœur est sans repos s’il ne repose pas en Toi » écrit saint Augustin. Philosophe et rhéteur, ce grand homme de l’Afrique du Nord du 4° siècle, a mis longtemps avant de comprendre cette vérité fondamentale.

Claire d’Assise, au début du 13° siècle, en pleine société féodale dont elle est une représentante de la noblesse, va choisir à dix-huit ans de se retirer dans une solitude de son pays, avec quelques compagnes. Saisie au tréfonds de l’âme par le message de son contemporain François Bernardone, citoyen d’Assise en Ombrie, région d’Italie centrale, Claire ne veut plus vivre que du Christ en total dépouillement de ce qui fait la trame de toute vie d’homme. Non par mépris pour ces dons merveilleux que sont une famille, une cité, un métier et de belles responsabilités, mais par pur amour de ce qui doit irriguer toute vie humaine authentique : aimer et être aimé en vérité, sans exclusion de qui que ce soit.

Délaisser ainsi la vie en plein monde, se limiter au seul horizon d’un lopin de terre, fusse-t-il le plus magnifique, se contenter de vivre de son humble travail quotidien, et s’affronter à la vie communautaire, dont personne n’ignore la difficulté, représente une authentique folie. Sans un puissant moteur de vie, sans un amour dépassant les limites de toute vie humaine, il faut avoir perdu la raison ou bien avoir découvert le secret de l’amour. Alors, sagesse suprême, le moine et la moniale se consacrent au seul combat qui vaille la peine d’aller jusqu’à la mort. Travailler avec ardeur à vaincre en soi l’amour propre et tous les égoïsmes qui entravent le cœur de l’homme, même du plus génial, pour être gagné au Christ : « Il s’agit pour moi de connaître le Christ, d’éprouver la puissance de sa résurrection et de communier aux souffrances de sa passion, en devenant semblable à lui dans sa mort, avec l’espoir de parvenir à la résurrection d’entre les morts. Certes, je n’ai pas encore obtenu cela, je n’ai pas encore atteint la perfection, mais je poursuis ma course pour tâcher de saisir, puisque j’ai moi-même été saisi par le Christ Jésus. Frères, quant à moi, je ne pense pas avoir déjà saisi cela. Une seule chose compte : oubliant ce qui est en arrière, et lancé vers l’avant, je cours vers le but en vue du prix auquel Dieu nous appelle là-haut dans le Christ Jésus. » Eph 3, 10-14

Le silence, le travail quotidien humble et fidèle, les exercices de pénitence, entendons de maîtrise de soi, les règles d’une vie en monastère, l’obéissance responsable à un(e) supérieur(e) comme à ses frères ou sœurs de communauté, sont autant de moyens pour gravir la montagne qui mène à une véritable humanité en Christ.

Parce qu’il y a des « sportifs de Dieu » qui s’essayent aux plus hauts sommets de ce que c’est que d’être homme, le bon peuple de Dieu est entrainé à mener ce combat primordial au sein même des beautés et des épreuves des circonstances de son histoire voyageuse. Là est bien l’enjeu de toute vie d’homme, garder le cap sur le but ultime de son pèlerinage terrestre, en faire l’âme de sa vie. Acquérir l’amour qui fait entrer au jour de sa mort dans la plénitude de l’Amour véritable. Ainsi parle saint Paul à ses chers Éphésiens, depuis sa propre prison : « Que le Christ habite en vos cœurs par la foi ; restez enracinés dans l'amour, établis dans l'amour. Ainsi vous serez capables de comprendre avec tous les fidèles quelle est la largeur, la longueur, la hauteur, la profondeur...Vous connaîtrez ce qui dépasse toute connaissance : l’amour du Christ. Alors vous serez comblés jusqu’à entrer dans toute la plénitude de Dieu. » Eph 3, 17-19

Ce buisson ardent, ce feu divin anime le cœur de Claire et de François d’Assise. Ce feu, par leur vie consumée et consommée, va se répandre chez leurs contemporains, susciter tant d’œuvres de charité et de conversions, jusque dans les structures de la société comme de l’art. « Aime de tout ton être Celui qui par amour pour toi, s’est donné tout entier. » écrit la Petite Plante de saint François à sa sœur Agnès de Prague 3° Lettre Écho merveilleux et pur de l’âme de saint François qui écrit dans sa lettre à ses frères sur le thème de l’Eucharistie : « Ne retenez pour vous rien de vous afin que vous reçoive tout entiers celui qui se donne à vous tout entier. » Lettre à l’Ordre 29

La vie monastique représente le poumon d’une société, une oasis de fraîcheur en humanité pour les hommes éprouvés de toutes sortes, une source de vie pour tenir dans le combat de la Vie véritable. Telle la samaritaine au bord du puits de Jacob, le bon peuple de Dieu trouve là une eau pure et limpide qui étanche non seulement sa soif humaine mais sa soif d’éternité. « Si tu savais le don de Dieu et qui est celui qui te dit : “Donne-moi à boire”, c’est toi qui lui aurais demandé, et il t’aurait donné de l’eau vive. » Jn 4, 10


Frère Jean-Dominique Dubois, ofm Le 24 janvier 2023, saint François de Sales


 
 
 

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